LA BEAUTÉ.

 

En premier lieu, on peut parler de la beauté, qui, le plus souvent d'ailleurs, est un des critères d'une photo réussie. Beauté révélée par la lumière et les jeux d'ombre qui l'accompagnent, par les nuances des couleurs, les contrastes…  Chacun s'accorde à reconnaître que la beauté est présente partout dans le monde. On parle de beaux paysages, de belles fleurs, de belles œuvres d'art, de beaux corps… Elle semble une valeur universellement reconnue. La beauté est. Mais elle ne prend sens que si elle est vue, que s’il y a rencontre. Passer à côté d'une fleur sans la voir ne change rien ni à la fleur, ni à soi. Celui qui la voit par contre ne reste pas indifférent, il est bouleversé, à des degrés divers, par ce cadeau offert par cette fleur, offrande qui n'attend rien en retour. C'est de ce cadeau accepté et de la joie profonde que ce don suscite en lui que le photographe veut témoigner. De ce moment suspendu dans le temps, unique et gratuit où disparaît la frontière entre l’extérieur et l'intérieur, où tout est là, où l'esprit est libre et le corps délié. De ce moment où, à partir d'une sensation visuelle, advient une émotion, un ressenti qui trace une voie en nous poussant à aller vers elle encore et ainsi donne sens à la vie. Le mot « sens » - qui est polysémique, exprimant à la fois sensation, direction et signification – est ainsi utilisé dans ses 3 acceptions. La beauté éveille nos sens, nous attire vers elle et crée en nous le désir de renouveler une expérience analogue. Pas la même expérience puisque l'événement est unique et éphémère mais de même qualité.

Et faut-il une disposition particulière pour voir la beauté ? Certains y sont-ils sensibles et d'autres non ? Est-ce là affaire de doux rêveurs peu au courant des « vraies réalités, des choses sérieuses » ? On peut légitimement se poser la question au vu des nombreuses destructions, des laideurs, bassesses ou autres atrocités quotidiennement versées au rang de « nouvelles » ou « actualités » plusieurs fois par jour, voire en continu… Et comment comprendre que, tels certains SS à la fois grands mélomanes et assassins, on cultive à la fois l'amour des jardins et la destruction de la Nature ? Il ne faut pas se leurrer, l'humain a une capacité de destruction totale et il ne s'en prive pas non seulement vis-à-vis des membres de sa propre espèce mais également de tous les mondes où il vit, le minéral, le végétal, l'animal, il attaque sans remords les cycles du vivant, modifie les écosystèmes et le climat… et pourtant, la plupart, si pas tous, semblent capables non seulement d'apprécier la beauté mais aussi de la créer.

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